ETAPE N°5 : SAISISSEZ LES COMMISSIONS ADMINISTRATIVES

Si le litige persiste c’est à dire que l’administration maintient ses redressements, vous pouvez demander la saisine des commissions administratives si certains chefs de redressements relèvent de la compétence de l’une ou l’autre de ces Commissions.

Le vérificateur doit vous indiquer que vous avez la possibilité de saisir les commissions compétentes en première page de la réponse à vos observations.

Vous disposez d’un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse à vos observations pour solliciter la saisine de ce ou ces commissions.

Garantie du contribuable vérifié :

  • L’administration est tenue de donner suite à votre demande de saisine si les conditions de recevabilité sont remplies.
  • Si le vérificateur ne vous indique pas dans la réponse aux observations la possibilité de saisir une Commission compétente, l’administration vous prive d’une voie de recours à laquelle vous pouvez prétendre.

Dans ce cas, la procédure de redressements est irrégulière ce qui entraîne la décharge des redressements.

NDRL : Pour faire valoir au mieux cette garantie, nous vous conseillons de prendre l’attache de votre avocat fiscaliste.

1/ La Commission Départementale des Taxes sur Le Chiffre d’Affaires et des Impôts Directs (CODEP)

  • A quoi sert cette Commission ?

Cette commission est une commission administrative dite « indépendante » qui va émettre un avis sur les redressements qui ont été maintenus à votre encontre au stade de la réponse aux observations du contribuable.

Cette commission est composée de représentants de l’administration et des représentants des contribuables et présidée par un magistrat du Tribunal Administratif ou de la Cour Administrative d’Appel. Leur nombre et leur qualité diffèrent selon la nature du litige soumis à l’appréciation de la commission (généralement deux représentants de l’administration et trois représentants des contribuables, dont, en principe, un expert-comptable).

Sur le plan territorial, la commission compétente est en principe celle du département où se trouve le lieu d’imposition (soit en fait le lieu où votre entreprise souscrit sa déclaration de résultats).

Toutefois, pour des motifs de confidentialité dont vous devez justifier, vous pouvez demander la saisine de la commission d’un autre département.

  • Comment saisir cette Commission ?

Vous devez informez le service vérificateur que vous souhaitez la saisine de cette Commission. Cette demande de saisine doit intervenir dans un délai de 30 jours suivant la réception de la réponse aux observations du contribuable.

Cette demande de saisine ne requiert aucun formalisme particulier.

La commission se prononcera sur tous les redressements que vous avez contesté dans vos observations à la proposition de rectification et qui entre dans son champ de compétence.

Ndrl : si vous avez accepté tacitement ou expressément certains redressements, vous ne pourrez plus les soumettre à la Commission Départementale.

  • Quel est son champ de compétence ?

Vous pouvez soumettre à l’avis de la CODEP les redressements portant sur (article L 59 LPF) :

  • le montant du résultat (industriel et commercial, agricole, non commercial) ou du chiffre d’affaires, si vous êtes soumis à une imposition selon le régime réel ;
  • la remise en cause de votre régime d’entreprises nouvelles ;
  • les rémunérations excessives c’est-à-dire que l’administration estime que certaines rémunérations (généralement de direction) sont excessives par rapport à votre activité dans l’entreprise et par voie de comparaison avec les autres entreprises ;
  • la valeur vénale d’un bien ayant été soumis à la TVA immobilière.

Dans ces domaines, la commission est compétente dans la mesure où le désaccord porte sur des questions de fait (exemples : appréciation du caractère normal d’une rémunération, caractère probant ou non d’une comptabilité en cas de rejet de la comptabilité), même si les faits sont susceptibles d’être pris en compte pour l’examen d’une question de droit.

En revanche, elle ne peut pas se prononcer sur les questions de droit elles-mêmes à l’exception des questions suivantes : caractère anormal d’un acte de gestion, principe et montant des amortissements et des provisions, caractère de charges déductibles des travaux immobiliers.

La commission est également compétente en ce qui concerne les demandes présentées par les contribuables pour obtenir la remise gracieuse de pénalités lorsque ces majorations sont consécutives à des rectifications relevant de la compétence de cette commission.

  • Qui compose cette Commission ?

Les membres siégeant à cette commission sont :

  • un président magistrat (de l’ordre administratif)
  • deux agents de la direction des services fiscaux
  • trois représentants des contribuables.

NDRL : si vous êtes affilié à un syndicat ou une association professionnelle, vous pouvez demander qu’un membre de votre syndicat ou association siège à cette commission.

  • Dois-je me faire assister devant cette Commission ?

Vous pourrez vous présenter vous-même à la séance de la commission ou vous faire représenter. Votre représentant doit justifier d’un mandat s’il n’est pas avocat.

Nous ne pouvons que vous inviter à vous faire représenter par votre conseil. En effet, les questions sont techniques et il convient d’élaborer un rapport avant la séance de la Commission, ce qui nécessite des compétences en matière de fiscalité et des connaissances sur les pratiques de la Commission Départementale.

  • Que se passe-t-il pendant la séance de la commission départementale ?

Vous ou votre conseil expliquerez les motifs de votre contestation des redressements en vous appuyant sur votre rapport.

Le service vérificateur exposera sa position et les motifs le conduisant à solliciter le maintien des redressements. Il est à rappeler que préalablement à la tenue de la séance de la Commission, vous aurez reçu le rapport de l’administration fiscale à la Commission qui expose et justifie de ses redressements.

En retour, vous aurez fait parvenir à la Commission Départementale un mémoire exposant votre argumentaire contre ces redressements et vos pièces justificatives.

La commission peut vous poser des questions afin d’éclaircir des points obscurs du dossier ou faire préciser certains chiffres.

  • Quelle est la portée de l’avis rendu par la Commission ?

La Commission rend un avis motivé sur le bien fondé ou non des redressements.

Cet avis vous sera notifié par le service vérificateur et est consultatif et (généralement dans les un à trois mois suivant la séance de la Commission Départementale). Toutefois en pratique, il est extrêmement rare que l’administration ne suive pas l’avis de la Commission.

Le service vérificateur vous notifiera :

  • l’avis de la Commission Départementale,
  • les redressements qu’il entend abandonner au vu de cet avis
  • et, les nouvelles conséquences financières en résultant en cas d’abandon de certains redressements.

Nous vous invitons à demander systématiquement la saisine de la Commission Départementale et ce pour deux motifs principaux :

  • Vous pouvez obtenir devant la Commission Départementale un avis favorable sur un certain nombre de redressements ; la Commission a souvent une approche assez pragmatique et concrète des dossiers, elle peut faire preuve d’un certain pragmatisme lié à une meilleure compréhension du mécanisme de la vie d’une entreprise alors que devant le Tribunal Administratif, une telle approche a moins de chance d’aboutir (devant le Tribunal, vous devez apportez une preuve indubitable du caractère non fondé du redressement) ;
  • Saisir cette Commission vous permet de « gagner » plusieurs mois avant la mise en recouvrement des impositions : tant que la Commission ne s’est pas réunie et que son avis ne vous a pas été notifié par l’administration fiscale, aucune mise en recouvrement des redressements (donc aucun paiement) ne peut intervenir.

2/ Comité de l’Abus de Droit Fiscal

Si l’administration fiscale a mis en œuvre la procédure de répression de l’abus de droit à votre encontre, vous pouvez demander la saisine du Comité de l’abus de droit fiscal.

Précisions :

  • Qu’est ce que l’abus de droit ?

Prévue par l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales (LPF), la procédure d’abus de droit permet à l’administration d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, des contrats, conventions ou montages juridiques qui sont fictifs ou qui, bien que licites, n’ont pour seul et unique but que celui d’atténuer ou éluder la charge fiscale d’un contribuable.

  • Quelles sont les conséquences de la mise en œuvre de l’abus de droit ?

L’administration écarte l’acte ou les actes qu’elle considère comme constitutif d’un abus de droit, recalcule les droits qui auraient été dûs sans ces actes, applique des intérêts de retard sur l’impôt différé et surtout applique une majoration de 40 % ou 80 % en fonction du rôle qu’elle attribue au contribuable dans la mise en place de l’opération constitutive d’abus de droit.

  • Saisine du Comité

En application de l’article L 64 du LPF, le comité peut être saisi à la demande du contribuable ou à l’initiative de l’administration.

En vertu de l’article R 64-2 du LPF, le contribuable dispose d’un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l’administration à ses observations pour demander que le litige soit soumis à l’avis du comité de l’abus de droit fiscal.

  • Intérêt de la saisine du Comité

La saisine du comité suspend la mise en recouvrement des impositions (c’est-à-dire retarde le paiement) qui ne pourra intervenir qu’après que cet organisme aura rendu son avis et que celui-ci aura été notifié au contribuable.

Par contre, l’avis du comité favorable à l’administration conduit à faire reposer la charge de la preuve sur le contribuable, alors que celle-ci repose sur l’administration à défaut de saisine, ou dans le cas d’un avis défavorable.

  • Composition et fonctionnement du comité

Le comité prévu à l’article L 64 du LPF comprend (CGI art. 1653 C) :

  • Un conseiller d’Etat, président ;
  • Un conseiller à la Cour de cassation ;
  • Un avocat ayant une compétence en droit fiscal ;
  • Un conseiller maître à la Cour des comptes ;
  • Un notaire ;
  • Un expert-comptable ;
  • Un professeur des universités, agrégé de droit ou de sciences économiques.

Les membres et les personnels du comité de l’abus de droit fiscal sont tenus au respect des règles de secret professionnel définies à l’article L 103 du LPF.

  • Fonctionnement du comité

Le contribuable est informé de l’argumentation soumise par l’administration fiscale au comité et a la faculté d’y répondre.

Le contribuable reçoit une copie du rapport transmis par l’administration fiscale et peut produire ses observations à ce rapport dans un délai de trente jours.

En application de l’article 1653 E du CGI, le contribuable et l’administration sont invités par le président du Comité à présenter leurs observations dans le cadre d’un débat oral et contradictoire.

Le contribuable conserve la possibilité de ne pas se présenter ou de se faire représenter.

  • Avis du comité

Le Comité émet un avis sur le bien-fondé de la mise en œuvre de la procédure de l’abus de droit fiscal.

L’avis rendu par le comité de l’abus de droit est consultatif et ne lie pas l’administration.

Cet avis est toutefois déterminant en cas de contentieux ultérieur quant à la charge de la preuve ; si cet avis est favorable à l’administration fiscale, la charge de la preuve est renversée.

  • Notification de l’avis

Le service notifie l’avis au contribuable et lui indique, en même temps, le chiffre d’après lequel il se propose de l’imposer.

Garantie du contribuable vérifié :

Il arrive que l’administration procède à des rectifications en suivant la procédure de droit commun prévue par l’article L 55 du LPF, sans invoquer l’article L 64 du LPF, alors que ces rectifications relèvent par nature de la procédure de l’abus de droit.

Dans ce cas, le juge peut requalifier l’argumentation de l’administration, en considérant que celle-ci invoque implicitement mais nécessairement les dispositions relatives à l’abus de droit. La procédure est dès lors irrégulière car dans ce cas de figure le contribuable n’a pu bénéficier de la saisine du Comité Consultatif des abus de droit et la proposition de rectification n’a pas été signée par un Inspecteur Divisionnaire.

3/ La Commission départementale de conciliation

  • Compétence

Lorsque l’administration relève une insuffisance des prix ou des évaluations d’après lesquels ont été liquidés les droits d’enregistrement, la taxe de publicité foncière ou l’impôt sur la fortune, le rehaussement qui en résulte est établi en suivant la procédure de rectification contradictoire.

A défaut d’accord amiable, le litige peut être soumis, dans le cadre de cette procédure, à la commission départementale de conciliation, à l’initiative de l’administration ou du contribuable.

L’intervention de la commission est possible lorsque l’insuffisance porte sur un immeuble, un fonds de commerce, une clientèle, un droit au bail (ou un transfert de droit à la jouissance d’immeuble), un navire ou un bateau, des titres de sociétés immobilières « transparentes », ainsi que sur des biens meubles corporels et des titres non cotés.

La commission compétente est celle dans le ressort de laquelle les biens sont situés (ou immatriculés s’il s’agit de navires ou de bateaux). A défaut (biens situés à l’étranger, essentiellement), la commission de Paris est compétente.

  • Fonctionnement et avis

La commission départementale de conciliation est présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire et comprend, en outre, huit membres : quatre représentants de l’administration, un notaire et trois représentants des contribuables.

Le contribuable doit être convoqué trente jours au moins avant la réunion de la commission et il est invité à se faire entendre ou à faire parvenir des observations écrites.

Le contribuable peut se faire assister par une personne de son choix ou désigner un mandataire.

La commission peut faire appel à un expert extérieur, sur demande et aux frais du contribuable.

Elle ne peut délibérer valablement que si cinq membres au moins sont présents, y compris le président. L’avis est formulé à la majorité des voix : en cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante. L’avis émis par la commission doit être motivé ; à défaut, la procédure d’imposition est irrégulière.